Au bilan d'une année 2010 cosmique en matière de jeux vidéo, on est en droit de se demander quel point à atteint le genre vidéo-ludique et où nous emmène-t-il? En effet, 2010 fut une année paradoxal, parfois en demie-teinte, parfois passionnante. Ainsi, nous, les gamers, avons pu assister à l'effondrement de colosses en terme de production et de moyens, surement trop espérés (je pense par exemple à Medal of Honor), nous avons été envoutés et surpris par des petites pépites (Limbo, oeuvre d'un studio indépendant) et nous avons une fois de plus été les témoins des conséquences d'une oligarchie bien ancrée (dont les dignes représentants ne sont autres que Call of Duty, World of Warcraft et autres titans). Cette diversité d'impacts a-t-elle changé la donne d'un secteur encore mis à mal?

 

 

Il serait idiot de le nier, le jeu vidéo commence à acquérir certaines lettres de noblesse. Bien sur, il demeure encore un hobby culturellement marginalisé, considéré comme un sous-genre. Néanmoins, nous avons pu voir fleurir quelques belles évolutions ici et là. Prenons l'exemple de l'exposition Museogames. Au musée des Arts et Métiers, le jeu vidéo fait une entrée remarquée puisque celui ci à fait l'objet de nombreux reportages et articles. Peu à peu, pas à pas, on commence à se faire à l'idée que le jeu vidéo est là, qu'il possède une histoire, que son influence sur la société et la culture n'est pas si absente que ça et qu'aujourd'hui, un jeu vidéo n'est pas qu'une série de coups de couteaux sur un joueur adverse. Ce bond dans les mentalités est peut-être du à l'apparition de plus en plus fréquentes de soft investis d'un but original, préférant raconter une histoire bien ficelée plutôt qu'un scénario de seconde zone, privilégiant une expérience innovante plutôt qu'une ré-édition. 

 

Ainsi, quelques bijoux nous sont tombés entre les mains durant cette 2010. Certains exemples prêtent sans doute à la controverse tant l'expérience est subjective. Limbo en est peut-être le fer de lance. On ne parle plus ici d'une simple oeuvre vidéo-ludique, d'une simple réussite digitale mais bien d'un achèvement artistique reconnu comme tel. Et ce n'est pas à coup de millions de dollars que Playdead, son développeur, aura acquis ses galons. En effet, Limbo va chercher dans l'expérience audio visuelle, ne craignant pas d'aller puiser dans des thèmes fantasques, sombres ou morbides. On peut y voir une certaine poésie: le joueur, avance, dans le silence des limbes, au carrefour de la violence crue et de la beauté artistique. J. G. DURAN déclarait un jour: "La poésie est une sorte de violence". Limbo est la preuve même que le monde vidéo-ludique peut être empreint d'une volonté artistique et originale et qu'il est parfois bon de détourner son regard des mastodontes du jeu vidéo vers les petites productions indépendantes.

 

Certaines choses n'ont toutefois pas bougé en 2010. Les poids lourds du jeu vidéo sont revenus à la charge et leurs passages ne laissent jamais indifférent. Comme chaque année, Call of Duty vend sa guerre éclair et le fait bien. Soutenue par des moyens financiers et techniques hors du commun, on retrouve une franchise telle qu'on l'avait laissé en 2009. Et plus on l'aime, cette franchise, plus on est lésé. Ainsi, l'une des plus grosses réalisations de cette année continue de rire de nous en n'offrant qu'une expérience de jeu minimale (principalement en terme de durée de vie). D'autres créateurs montrent toutefois un énorme respect du joueur tant dans la qualité que dans leur volonté de produire un jeu exceptionnel. C'est le cas de Bioware qui offre chaque fois une expérience inoubliable, qu'elle se déroule dans une galaxie avec Mass Effect 2 ou dans tout autre paysage fantasmé. On trouve ici une justification des moyens mis en oeuvre pour nous offrir des soft de grande qualité, année après année. 

 

Ce qu'il faut retenir avant tout, c'est que la qualité des jeux sortis en 2010 n'a pas cessée d'évoluer au fil de l'année. 2011 se fait également pressentir comme sa digne héritière. Mais cette qualité ne doit pas être uniquement expliquée par l'amélioration des moyens techniques et l'augmentation des budgets alloués. Ce serait mésestimer celui qui a le rôle principal dans cet univers: le joueur. Depuis quelques années, le joueur a lui aussi évolué: plus critique et surtout plus exigeant. Le monde vidéo-ludique s'est plié à ses attentes. Si le secteur du jeu vidéo mue si rapidement, c'est aussi parce que le gamer est désormais intransigeant, intolérant envers les jeux bâclés, élogieux concernant les réussites.

 

En bref, au cours de l'année 2010, beaucoup de jeux sont sortis sur un marché qui ne laissent de place qu'à l'exceptionnel ou au premier arrivé. Pour se faire une place, il faut savoir conquérir le coeur des joueurs et cela ne se fait plus si simplement. La démarche n'est plus la même. Désormais, c'est l'originalité qui prime et si les adeptes de la manette continuent à montrer ce visage critique, il y a des chances que le jeu vidéo grimpe dans les échelons culturels jusqu'à peut-être obtenir une reconnaissance digne de ce nom. Qui sait?